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Nosferatu le vampire (Nosferatu, eine Symphonie des Grauens) est un film réalisé en 1922 par Wilhelm Friedrich Murnau. Le scénario d’Henrik Galeen est tiré du roman de Bram Stoker, Dracula. La veuve de l’écrivain s’étant opposée à l’adaptation du livre à l’écran, Murnau et son équipe durent modifier certains éléments tels que les noms des personnages (et par conséquence celui du film) ou encore le lieu du déroulement de l’action. La trame narrative reste cependant inchangée.
Synopsis :
Dans les années 1838, Thomas Hutter part pour la Transylvanie où il est chargé de vendre une propriété au Comte Orlok. Le Comte Orlok (Nosferatu) souhaite acquérir une résidence dans la ville de Wisborg où vivent Thomas et son épouse Ellen. En apercevant une photographie d’Ellen, le vampire Nosferatu décide d’acheter une maison faisant face à celle du couple. L’arrivée du vampire dans la petite ville, provoque la mort des habitants de la ville qui croient d’abord en une épidémie de peste. Ellen, objet de convoitise de Nosferatu, finira par lui sacrifier sa vie en lui offrant son sang pour sauver celle des habitants.
Contrairement au Cabinet du Dr. Caligari où l’influence du courant pictural expressionniste est très marquée dans les décors, dans le maquillage des personnages et dans leur jeu, elle est beaucoup plus subtile dans Nosferatu. En effet, ce chef d’œuvre de Murnau s’inscrit dans la deuxième forme du cinéma expressionniste. L’influence se ressent davantage dans le scénario, dans les jeux d’ombres et de lumières, et dans les trucages mis en place par Murnau.
Ce qui est avant tout frappant dans le film et qui rompt avec les films de la mouvance expressionniste l’ayant précédé, ce sont les décors. En effet, on peut remarquer que de nombreuses scènes ne se déroulent plus dans décors factices mais réels (certaines séquences sont même filmées à l’extérieur). Cependant, l’ambiance si caractéristique des films expressionnistes reste la même. Le fait que la plupart des scènes d’intérieur se déroulent dans des endroits clos et confinés combiné à la grande tension régnant dans le film produit le malaise chez le spectateur. Une sensation d’étouffement et une atmosphère lourde qui fait écho au désordre politique, économique et social de l’Allemagne de l’époque. Ce film est bien plus qu’un film fantastique, Nosferatu peut être considéré comme une métaphore du destin de l’Allemagne. A l’image de la montée en puissance du nazisme dans la société de l’époque, Nosferatu amène avec lui le mal, la mort et la terreur dans le village.
De même, l’approche de Murnau est beaucoup plus créative au niveau du médium cinématographique. Les bandes sont par exemple, colorisées. En effet, elles changent de couleur selon l’atmosphère voulue. Ainsi dans certaines scènes nocturnes, la pellicule est teintée en bleu alors que dans d’autres scènes diurnes, elle est teintée en jaune. Mais l’utilisation de ce procédé de colorisation permet également de plonger le spectateur dans des émotions bien précises (angoisse, frayeur…).
Murnau met également en place d’autres effets spéciaux pour accentuer l’atmosphère inquiétante. Notamment grâce aux nombreux effets d’ombre et de lumière. Dans certaines séquences, le cinéaste privilégie le pouvoir de suggestion : plutôt que de montrer Nosferatu, il préfère évoquer sa présence par son ombre. Dans la fameuse scène de l’escalier où le vampire s’apprête à pénétrer dans la chambre d’Ellen, seule l’ombre du personnage est visible. L’apparence déjà rebutante de Nosferatu (nez crochu, dos voûté, dents et oreilles difformes, doigts allongés) est accentuée par son agrandissement et sa distorsion.
Toute représentation réaliste est ici intentionnellement évitée. Et c’est notamment en ce point que le film peut être qualifié d’expressionniste. Nous pouvons le voir au travers du maquillage de Max Schreck incarnant Nosferatu dont le visage est complètement déformé. Mais aussi dans le contraste noir/blanc qui confère un aspect fantomatique aux personnages ou encore dans le jeu d’acteur très exubérant. De même, les prises de vue peu habituelles (en diagonale ou en oblique) rappellent les lignes anguleuses typiques du courant pictural. Autant d’éléments qui constituent une esthétique de l’outrance induisant la peur et l’angoisse.
L’influence des peintres expressionnistes allemands et scandinaves est par ailleurs palpable dans le film. En particulier les toiles de Marianne von Werefkin (du groupe Der Blaue Reiter) ou encore celles de l’artiste norvégien Edvard Munch, en raison des thématiques abordées et de leur mode de représentation.
Le vampire, Edvard Munch, 1893
Rote Stadt, Marianne von Werefkin, 1909
A l’aube, Marianne von Werefkin, 1914
Liens :
http://195.115.141.14/murnau/index.htm
http://www.ecrannoir.fr/films/00/shadowvampire/
http://www.premiersplans.org/festival/documents/fp_nosferatu.pdf/
Pour regarder le film en intégralité, cliquez ici :
http://www.youtube.com/watch?v=8yKKog3xTQ8&feature=fvst
SH